Préface

Le document qui suit a été entièrement rédigé par mon père, Georges HATT, alors qu’il était prisonnier de guerre en Autriche, au crayon, de sa petite écriture serrée (décryptée à la loupe), sur de minuscules carnets de 7×11 cm, totalement saturés par manque de papier. Il était lieutenant dans un Groupement de Renseignement[1], et à ce titre, comme officier, fut interné en OFLAG et n’a pas eu à travailler pour l’Allemagne. Il lui a fallu s’occuper, en particulier en écrivant tous les jours quelque chose. L’introduction de ce récit ainsi que quelques corrections apportées manifestement pour le style, font penser à une envie de faire réellement une œuvre, et pas seulement de garder la mémoire des faits. Pourtant, Georges HATT n’a pas tapé ce texte à la machine à son retour en 1945 (ou bien cela a été perdu), contrairement à ce qu’il a fait avec le récit de sa libération.

Peut-être que, peu fier de ce qui était arrivé à l’Armée Française dont il était un officier très patriote à l’époque (d’autres écrits le prouvent), il n’a pas voulu après la guerre évoquer la débâcle.

Je ne l’ai moi-même jamais entendu parler des conditions dans lesquelles il avait été fait prisonnier, alors qu’il lui arrivait de raconter quelques rares anecdotes du camp : « l’Académie », qui réunissait dans un seul local sans cloison les 40 sièges des toilettes, après que le bois eut été brûlé pour réchauffer les baraques, par le grand froid d’hiver en Moravie, par exemple. Je me souviens de l’approbation qu’il avait faite du film « la Grande Evasion » que nous avons vu ensemble, et à la suite duquel il a dit « C’était tout à fait comme cela ! » sans plus de commentaire.

A la suite d’une exposition sur « les Prisonniers de Guerre » au musée de la Résistance de Lyon, j’ai rouvert les documents concernant l’OFLAG XVIIA laissés par Georges HATT. L’exploitation de ces petits carnets, jugés jusque là illisibles, lève le voile sur un évènement qui m’était resté mystérieux, et dont à la limite je me demandais s’il n’avait pas manqué de gloire. Je suis heureux et rassuré sur ce plan, et j’ai été intéressé de découvrir ce que fut la débâcle vue de l’intérieur de l’Armée par l’un de ses jeunes officiers.

Didier HATT

 


[1] GRDI 46 du 12° Corps d’Armée, 5° Armée (Toutes les notes sont de Didier Hatt)